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Monday, April 25, 2011

Fin de la Continuité d'un Régime ? - Par Ray Killick


24 avril 2011

Préval tente désespérément de réaliser au moins une partie de son plan électoral machiavélique de domination de l'échiquier politique qui prévoyait:

1) Le retour de Jean-Claude Duvalier pour détourner l'attention des résultats du premier tour du scrutin et propulser Jude Célestin au deuxième tour
2) Un second tour : Célestin vs. Manigat
3) Un Célestin triomphant au second tour (Cependant, le plan déjoué par l'international, Préval a dû adopter Mirlande Manigat qui embrasse à son tour l'Inité et sa continuité. Erreur stratégique monumentale qui lui fait perdre la confiance de supporters puissants du premier tour.)
4) Le retour d'Aristide pour influencer le second tour (pawol de gren gòch: Malanga pou Manigat, etc. Lèt bèf pi bon pase lèt manman)
5) Le détournement des résultats à la faveur de Mirlande Manigat (Qui-perd-gagne-et-perd était le moyen le plus sûr de réaliser la récupération du pouvoir. On a fait croire à la candidate malheureuse qu'on allait éliminer une telle quantité de PVs qu'elle serait l'heureuse élue avec ses 31% qui deviendraient alors comme par enchantement 51% des résultats validés par le CEP magouilleur.)
6) Éventuellement le contrôle du parlement et donc du prochain gouvernement.

Évidemment, tout cela se concoctait sans prendre au sérieux la détermination de l'international d'élever la voix et de faire des pressions directes où cela fait mal :

1) Révocation par l'ambassade américaine des visas des petits-jouisseurs du parlement et du gouvernement inconscients de leurs responsabilités en tant que serviteurs publics. Résultat : Jude Célestin est éliminé
2) Pression de dernière heure de l'international à la veille du 5 avril (déclaration des résultats préliminaires) pour faire respecter le vote populaire et éviter au pays des jours sombres : les résultats préfabriqués qui ont bercé d'illusion le camp Manigat sont écartés, Martelly remporte le deuxième tour, car le coup "pa konpran'n" est avorté.

L'ambassade américaine vient d'émettre un communiqué condamnant les magouilles de Préval et du CEP pour catapulter 18 "triple J" au parlement. (entendez "député j'approve"). Décidément, Préval et consorts ne veulent donner aucune chance à ce pays même après avoir amassé des fortunes colossales et détruit des relations internationales qui auraient permis de tirer avantage de la bonne disposition de certains gouvernements à notre égard. (Où sont passés les $270 millions de Chavez ? Où sont les autres usines électriques que Chavez avait promis ? )

Bertrand Woldson du CERESS écrit : "Il faudra qu'à l'avenir, il n'y ait plus d'amateurs au CEP. Il nous faut travailler pour que soit nommé dans les hautes fonctions au niveau de l'institution électorale, des hommes et des femmes de caractère, probes, honnêtes, crédibles, compétents, sérieux et travailleurs."

Je suis d'accord avec la deuxième partie concernant un CEP d'hommes et de femmes crédibles. Quant à la première partie, elle est beaucoup trop gentille à l'égard de magouilleurs et de valets du pouvoir apatride, car il ne s'agit pas d'amateurs ici, il s'agit bien de vauriens qui nous attirent la honte de l'étranger et leur intervention permanente dans nos affaires pour nous rappeler à l'ordre comme des gamins qui n'ont pas encore atteint l'âge de la raison. C'est une situation extrêmement grave. J'espère qu'au moins le prochain pouvoir saura restaurer l'autorité et la compétence de l'État à tous les niveaux pour mettre fin à cette continuité de régimes démissionaires depuis 1957, régimes de "san-manmans", de "m'fè sa'm vle, sa'm pi pito".

Cette dernière version du régime de 1957 que nous vivons depuis 1994 avec le retour d'Aristide a produit les pages les plus sombres de toute l'histoire nationale depuis 1804. Les sinistres auteurs de l'histoire de ces dix-sept dernières années ont tellement tout chambardé que nous ne savons plus ce que c'est que l'État, le rôle du serviteur public et l'État sine ira et studio, etc. Voilà ce qu'on obtient quand un visionnaire de l'Enfer sur Terre, François Duvalier, croit que le meilleur moyen de promouvoir la Classe (les noiristes) est de lui permettre de piller l'État au détriment des masses, au détriment du public, leur propre détriment en fin de compte. Voilà où nous amène la politique de la peau. Voilà pourquoi nous avons une logique de régime dont la finalité ne pouvait être que la destruction complète de l'État. En d'autres termes, le duvaliérisme, le noirisme et lavalas ne sont qu'une seule et même chose issue d'une conception originale de la chose publique qui une fois matérialisée ne pouvait qu'amorcer la chute libre de l'État-nation.  Voilà pourquoi 1986 était irrécupérable dans un vacuum de leadership, 1991 un leurre d'un vulgaire orateur de carrefours, 1994 une illusion made in White House de Bill Clinton, et 2004 une trahison de peuple par le Groupe des 184. Que sera 2011 au regard de 2016 ?

Tout dépend des forces rivales qui ont amené Michel Martelly au pouvoir et surtout de la capacité de leadership de ce dernier. Si Martelly se contente tout simplement de n'être qu'un instrument ou un cheval de bataille de ces forces, Haïti est foutue. Si par contre Martelly a suffisamment de dextérité politique, il saura rebattre ses cartes et refaire ses alliances pour assembler les forces capables de transformer l'État en État de droit et le mettre au service du public. Le camp de l'honnêteté et du service public est le camp de la solitude en ce pays de misères où les plus vocaux se posent en patriotes pour enfin régler leurs petites affaires, leurs petites patates, une fois arrivés au pouvoir. J'ai lu une fois Martelly paler de la culture d'exécution. J'espère qu'il y croit et qu'il saura se hisser à la hauteur de l'enjeu de l'heure et poser pour la postérité en implantant cette culture au sein de l'État. Ce serait un tour de force à nul autre pareil et qui vaudrait à son architecte et réalisateur le titre de pater patrii (le père de sa patrie).

Toutes les fois que ce pays a eu une opportunité de négocier un redépart, les forces du moment se sont crues invincibles et pérennes. Elles croyaient pouvoir gérer le pouvoir que par la force et la démagogie au lieu d'émanciper ce peuple et gagner sa confiance en le ramenant "des bois" vers la civilisation . Elles ont perdu le pouvoir évidemment sans que le régime de la Classe ne change. Le meilleur moyen d'évincer les forces de la Classe (noiriste, pilleuse, anti-public, anti-patrie, anti-émancipation) est de faire vivre au pays un nouveau contrat social et non lui dédier un morceau de papier bourré de mensonges comme en 2004. La Caravane de l'Espoir des riches ne doit pas être un leurre, un moyen vers des fins inavouées et inavouables, "ban'n de san-manman". À bon entendeur, salut ! À 2016 !

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